La traçabilité des fonds vers l’Ukraine se perd
La nouvelle de la chute de Lougansk dimanche dernier s’inscrit dans ce qui apparait comme l’inexorable annexion de l’est de l’Ukraine par la Russie. Aucune action militaire ukrainienne n’a, à ce jour, contrecarré l’action des troupes russes. Malgré l’énormité de l’arsenal transféré à ce pays depuis 2014 et singulièrement depuis février 2022, la vétusté de l’équipement et le manque de professionnalisme des combattants ukrainiens est en jeu. Alors que Volodymyr Zelensky continue de réclamer des armes, notamment que lui soit alloué 1% de l’arsenal de l’Otan, se pose la question de savoir ce qui a été fait de ce qui a déjà été obtenu. Dans quelles mains se trouvent ces stocks ainsi que les dons milliardaires concédés aux fins d’équipement militaire ?
À Lugano, une conférence sur la reconstruction de l’Ukraine a lieu ces 4 et 5 juillet, en présence d’Ursula von der Leyen, le Premier ministre ukrainien, Denys Schmigal, le président de la Rada (parlement ukrainien), Rouslan Stefantchouk. Il s’agit de débloquer des fonds nouveaux. Il est fort peu probable que la question de la traçabilité des fonds leur sera posée. Aspect d’autant plus crucial que la responsabilité des nations donatrices est en jeu.
Selon un papier de l’association de pénalistes européens, Eucrim, « Guerre et Corruption en Ukraine », le secteur de la défense, principal vecteur industriel de ce pays, suffisant en soi pour garantir un niveau respectable de sécurité, a toujours été miné par la corruption. Les organes de lutte contre ce fléau, déjà inefficients en temps de paix, sont définitivement aux abonnés absents. Sous la pression internationale, en 2020, l’Ukraine, un des pays les plus corrompus du monde (Voir : Cette Ukraine si européenne), s’était doté de trois corps anticorruption : le NABU (par ses sigles en anglais ou Bureau national de la lutte contre la corruption), le SAPO (Procureur spécial contre la corruption) et enfin la HACC (Haute Cour spéciale contre la corruption). Ces trois entités s’étaient surprenamment mises à travailler jusqu’à ce que les membres du parlement ukrainien, la Verkhovna Rada, dans lequel siège la majorité présidentielle de Zelensky, bloquent en décembre 2021 la nomination du procureur SAP, dont son président est présent ce jour à Lugano pour demander davantage d’argent public occidental pour son pays. Ça, c’est pour le contexte institutionnel dans lequel les aides stratosphériques et les armes sont livrées.
Les aides arrivent en vagues. Celle qui démarre à partir de 2014, lors de la première opération ukrainienne de l’administration Obama-Biden, surgie en concomitance avec les événements de la place Maiden. Opération qui s’intensifie à partir de 2016, s’ouvrant à d’autres donateurs, notamment français. À partir de janvier 2022, lorsque les relations entre l’Ukraine et la Russie sont rompues et que le pilonnage du Donbass par des bataillons ukrainiens redouble, le flux d’armes et d'aides financières explose.
Le think thank économique allemand, le Kiel Institue, a créé un instrument de traçabilité des aides versées à l’Ukraine qui permet de reconstituer une partie de celle-ci. Entre les quinze principaux donateurs souverains au cours de la période allant du 24 janvier au 24 juin 2022 se trouve, bien sûr, en tête, les États-Unis. Ce pays a déboursé 10 milliards de dollars d’aide financière non spécifiée, à laquelle s’ajoutent 10 milliards d’aides humanitaires, et un peu moins de 30 milliards d’euros en aide financière militaire. À titre de comparaison, le total des réserves d’Ukraine en 2021, selon la Banque mondiale, était de 30,97 milliards de dollars américains. À cette somme s’ajouterait une nouvelle enveloppe de 800 millions de dollars. C’est le dernier engagement en date de Joe Biden, pris dans le cadre du sommet de l’Otan de Madrid du 28 juin. Seulement au chapitre de l’aide publique américaine, la somme dépasse de loin le benchmark des plus grosses enveloppes des plans de sauvetage du Fonds monétaire international (FMI), et il s’agit de dons, non pas de crédits. Ce sont des sommes qui n’entrent nulle part dans les comptes publics du pays récepteur. L’Union européenne, au travers de trois de ses institutions (la Commission, le Conseil et la Banque européenne d’investissement), a pour sa part promis 15 milliards d’euros, desquels 6 milliards auraient effectivement été déboursés, encore que l’information soit très difficile à confirmer du fait de l’opacité des comptes de tout ce qui vient de Bruxelles. C’est pratiquement la somme de toutes les aides distribuées par l’UE en 2020, mais entre plusieurs pays, dont la Turquie, le Maroc, l’Inde, la Syrie, l’Éthiopie, l’Égypte, la Somalie, l’Afghanistan, la Colombie. En moins d’un semestre, l’Ukraine a consommé plus d’aides européennes que ce que plusieurs pays en guerre ou sortant d’un conflit armé, voire affecté d’une importance stratégique immédiate pour l’Europe ont consommé en un an.
La France est le septième donateur public, avec un peu moins de 3 milliards d’euros déboursés en ce qui va de l’année. Mais la France a été le plus grand exportateur d’armes vers l’Ukraine de 2015 à 2020, pour une valeur de 1,6 milliard d’euros. Aide en armes, entre lesquelles se comptent des hélicoptères, des drones de reconnaissance, et de l’armement lourd. À la différence des Etats-Unis, la France ne rend pas public la liste des équipements fournis, mais il s’agit d’armes offensives.
Le 26 février 2022, cette aide s’est accrue d’équipements pour une valeur de 120 millions d’euros (fourniture de Milan, Javelin, Mistral, etc.). La république offre en outre l’accès au système d’intelligence satellitaire hexagonal (CSO, Pléiade, Hélios). Le 30 mai, le ministre de la Défense ukrainien, Dmitrov Kuleba, a exprimé sa gratitude à la France. Des armes françaises sont aussi parvenues, au travers de pays tiers, tels que les 100 mistral fournis par la Norvège à l’Ukraine, chose qui ne peut se faire qu’avec l’accord du pays producteur. L’arsenal livré par le Royaume-Uni prend la forme du catalogue d’un salon de l’armement. Il ne manque rien. Il convient de souligner, une et l’autre fois, le cadre financier, stratégique, contractuel, totalement hermétique de ces livraisons. Entre les grandes puissances industrielles militaires, seul Israël et le Japon se sont abstenus de répondre aux appels de pied de Zelensky, n’offrant autre chose que des casques et des gilets pare-balles.
Ces aides viennent s’ajouter aux 450 millions d’euros promis à l’Ukraine par l’Union européenne pour l’achat d’armes létales, dans le cadre de l’European Peace Facility mis en place en 2021. Ce sont 17 milliards de prêts garantis entre 2014 et le 12 février 2022. La liste des milliards qui pleuvent depuis 2014 sur l’Ukraine donne le tournis. Les institutions de Bretton Woods ne sont pas en reste. La Banque Mondiale a pour sa part promis en mars dernier 3 milliards de dollars, dont 550 millions d’urgence et le FMI, 5 autres milliards de crédits.
Alors oui, où sont passés ces aides humanitaires, ces armes ? Il y a un front de l’est qui fait office d’appel pour recevoir des fonds avec des soldats équipés d’armes datant de l’Union soviétique, et ensuite une vie à l’ouest du Dniepr qui se déroule normalement. À qui vont les aides humanitaires ? La première vague d’immigration après l’annonce de l’attribution d’office d’un visa communautaire de trois ans s’est tarie, et les transferts de réfugiés se font désormais vers la Russie. Y a-t-il un office pour contrôler ou du moins coordonner l’usage des fonds ?
Les fonctionnaires de la Cour européenne d’auditeurs n’ont plus émis de rapport sur l’Ukraine depuis 2016. Pourtant l’institution se présente comme « la gardienne des finances de l’UE ». La seule mention sur leur site est celle du drapeau bleu et jaune et un message de solidarité au peuple d’Ukraine. Selon Eucrim, au regard de la corruption, « la situation avant la guerre n’était pas brillante en Ukraine » : « aucune amélioration significative n’avait été réalisée ». Faut-il en conclure, que les auditeurs de l’UE n’avaient pas vraiment impressionné l’oligarchie mafieuse au pouvoir ? Selon l’auteur du rapport de l’Eucrim, « après la guerre, le cadre de lutte contre la corruption sera pire que ce qu’il était avant la guerre, dans la mesure où il devra faire face à de sérieux challenges, spécialement ceux résultant du vaste influx de matériel et de support financier pour des objectifs humanitaires. »
Mais si l’Ukraine est la bête noire des experts de la lutte contre la corruption et du crime organisé, ils devraient commencer à regarder à l’ouest. La massivité des fonds multimilliardaires qui se font hors de tout contrôle et qui n’entrent pas dans les comptes publics de l’État ukrainien, se prêtent aussi à des retours non négligeables. En particulier au regard du passé corrompu de la famille Biden en Ukraine. Potentiellement, toutes les conditions sont données pour créer les conditions idéales d’un niveau de détournement de fonds anthologique ce, en pleine lumière du jour. Pendant que le monde se coupe les veines pour l’Ukraine et se prépare à une dépression économique qui fera histoire.
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À Lugano, une conférence sur la reconstruction de l’Ukraine a lieu ces 4 et 5 juillet, en présence d’Ursula von der Leyen, le Premier ministre ukrainien, Denys Schmigal, le président de la Rada (parlement ukrainien), Rouslan Stefantchouk. Il s’agit de débloquer des fonds nouveaux. Il est fort peu probable que la question de la traçabilité des fonds leur sera posée. Aspect d’autant plus crucial que la responsabilité des nations donatrices est en jeu.
Selon un papier de l’association de pénalistes européens, Eucrim, « Guerre et Corruption en Ukraine », le secteur de la défense, principal vecteur industriel de ce pays, suffisant en soi pour garantir un niveau respectable de sécurité, a toujours été miné par la corruption. Les organes de lutte contre ce fléau, déjà inefficients en temps de paix, sont définitivement aux abonnés absents. Sous la pression internationale, en 2020, l’Ukraine, un des pays les plus corrompus du monde (Voir : Cette Ukraine si européenne), s’était doté de trois corps anticorruption : le NABU (par ses sigles en anglais ou Bureau national de la lutte contre la corruption), le SAPO (Procureur spécial contre la corruption) et enfin la HACC (Haute Cour spéciale contre la corruption). Ces trois entités s’étaient surprenamment mises à travailler jusqu’à ce que les membres du parlement ukrainien, la Verkhovna Rada, dans lequel siège la majorité présidentielle de Zelensky, bloquent en décembre 2021 la nomination du procureur SAP, dont son président est présent ce jour à Lugano pour demander davantage d’argent public occidental pour son pays. Ça, c’est pour le contexte institutionnel dans lequel les aides stratosphériques et les armes sont livrées.
Les aides arrivent en vagues. Celle qui démarre à partir de 2014, lors de la première opération ukrainienne de l’administration Obama-Biden, surgie en concomitance avec les événements de la place Maiden. Opération qui s’intensifie à partir de 2016, s’ouvrant à d’autres donateurs, notamment français. À partir de janvier 2022, lorsque les relations entre l’Ukraine et la Russie sont rompues et que le pilonnage du Donbass par des bataillons ukrainiens redouble, le flux d’armes et d'aides financières explose.
Le think thank économique allemand, le Kiel Institue, a créé un instrument de traçabilité des aides versées à l’Ukraine qui permet de reconstituer une partie de celle-ci. Entre les quinze principaux donateurs souverains au cours de la période allant du 24 janvier au 24 juin 2022 se trouve, bien sûr, en tête, les États-Unis. Ce pays a déboursé 10 milliards de dollars d’aide financière non spécifiée, à laquelle s’ajoutent 10 milliards d’aides humanitaires, et un peu moins de 30 milliards d’euros en aide financière militaire. À titre de comparaison, le total des réserves d’Ukraine en 2021, selon la Banque mondiale, était de 30,97 milliards de dollars américains. À cette somme s’ajouterait une nouvelle enveloppe de 800 millions de dollars. C’est le dernier engagement en date de Joe Biden, pris dans le cadre du sommet de l’Otan de Madrid du 28 juin. Seulement au chapitre de l’aide publique américaine, la somme dépasse de loin le benchmark des plus grosses enveloppes des plans de sauvetage du Fonds monétaire international (FMI), et il s’agit de dons, non pas de crédits. Ce sont des sommes qui n’entrent nulle part dans les comptes publics du pays récepteur. L’Union européenne, au travers de trois de ses institutions (la Commission, le Conseil et la Banque européenne d’investissement), a pour sa part promis 15 milliards d’euros, desquels 6 milliards auraient effectivement été déboursés, encore que l’information soit très difficile à confirmer du fait de l’opacité des comptes de tout ce qui vient de Bruxelles. C’est pratiquement la somme de toutes les aides distribuées par l’UE en 2020, mais entre plusieurs pays, dont la Turquie, le Maroc, l’Inde, la Syrie, l’Éthiopie, l’Égypte, la Somalie, l’Afghanistan, la Colombie. En moins d’un semestre, l’Ukraine a consommé plus d’aides européennes que ce que plusieurs pays en guerre ou sortant d’un conflit armé, voire affecté d’une importance stratégique immédiate pour l’Europe ont consommé en un an.
La France est le septième donateur public, avec un peu moins de 3 milliards d’euros déboursés en ce qui va de l’année. Mais la France a été le plus grand exportateur d’armes vers l’Ukraine de 2015 à 2020, pour une valeur de 1,6 milliard d’euros. Aide en armes, entre lesquelles se comptent des hélicoptères, des drones de reconnaissance, et de l’armement lourd. À la différence des Etats-Unis, la France ne rend pas public la liste des équipements fournis, mais il s’agit d’armes offensives.
Le 26 février 2022, cette aide s’est accrue d’équipements pour une valeur de 120 millions d’euros (fourniture de Milan, Javelin, Mistral, etc.). La république offre en outre l’accès au système d’intelligence satellitaire hexagonal (CSO, Pléiade, Hélios). Le 30 mai, le ministre de la Défense ukrainien, Dmitrov Kuleba, a exprimé sa gratitude à la France. Des armes françaises sont aussi parvenues, au travers de pays tiers, tels que les 100 mistral fournis par la Norvège à l’Ukraine, chose qui ne peut se faire qu’avec l’accord du pays producteur. L’arsenal livré par le Royaume-Uni prend la forme du catalogue d’un salon de l’armement. Il ne manque rien. Il convient de souligner, une et l’autre fois, le cadre financier, stratégique, contractuel, totalement hermétique de ces livraisons. Entre les grandes puissances industrielles militaires, seul Israël et le Japon se sont abstenus de répondre aux appels de pied de Zelensky, n’offrant autre chose que des casques et des gilets pare-balles.
Ces aides viennent s’ajouter aux 450 millions d’euros promis à l’Ukraine par l’Union européenne pour l’achat d’armes létales, dans le cadre de l’European Peace Facility mis en place en 2021. Ce sont 17 milliards de prêts garantis entre 2014 et le 12 février 2022. La liste des milliards qui pleuvent depuis 2014 sur l’Ukraine donne le tournis. Les institutions de Bretton Woods ne sont pas en reste. La Banque Mondiale a pour sa part promis en mars dernier 3 milliards de dollars, dont 550 millions d’urgence et le FMI, 5 autres milliards de crédits.
Alors oui, où sont passés ces aides humanitaires, ces armes ? Il y a un front de l’est qui fait office d’appel pour recevoir des fonds avec des soldats équipés d’armes datant de l’Union soviétique, et ensuite une vie à l’ouest du Dniepr qui se déroule normalement. À qui vont les aides humanitaires ? La première vague d’immigration après l’annonce de l’attribution d’office d’un visa communautaire de trois ans s’est tarie, et les transferts de réfugiés se font désormais vers la Russie. Y a-t-il un office pour contrôler ou du moins coordonner l’usage des fonds ?
Les fonctionnaires de la Cour européenne d’auditeurs n’ont plus émis de rapport sur l’Ukraine depuis 2016. Pourtant l’institution se présente comme « la gardienne des finances de l’UE ». La seule mention sur leur site est celle du drapeau bleu et jaune et un message de solidarité au peuple d’Ukraine. Selon Eucrim, au regard de la corruption, « la situation avant la guerre n’était pas brillante en Ukraine » : « aucune amélioration significative n’avait été réalisée ». Faut-il en conclure, que les auditeurs de l’UE n’avaient pas vraiment impressionné l’oligarchie mafieuse au pouvoir ? Selon l’auteur du rapport de l’Eucrim, « après la guerre, le cadre de lutte contre la corruption sera pire que ce qu’il était avant la guerre, dans la mesure où il devra faire face à de sérieux challenges, spécialement ceux résultant du vaste influx de matériel et de support financier pour des objectifs humanitaires. »
Mais si l’Ukraine est la bête noire des experts de la lutte contre la corruption et du crime organisé, ils devraient commencer à regarder à l’ouest. La massivité des fonds multimilliardaires qui se font hors de tout contrôle et qui n’entrent pas dans les comptes publics de l’État ukrainien, se prêtent aussi à des retours non négligeables. En particulier au regard du passé corrompu de la famille Biden en Ukraine. Potentiellement, toutes les conditions sont données pour créer les conditions idéales d’un niveau de détournement de fonds anthologique ce, en pleine lumière du jour. Pendant que le monde se coupe les veines pour l’Ukraine et se prépare à une dépression économique qui fera histoire.
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