vendredi 22 septembre 2023

INCOMPETENCE

 

Comment les Chinois vont punir l’Allemagne pour avoir insulté Xi Jinping


Il faut bien se poser la question : Annalena Baerbock est-elle faite pour être ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne ? Le chancelier Scholz devrait au moins s’interroger sur le nombre de gaffes diplomatiques accomplies par sa ministre écologique en quelques mois. Baerbock est devenue la reine des casseroles au Brésil, en Chine, etc. … Mais Scholz a-t-il la capacité politique, voire le courage, de maîtriser Baerbock, laquelle semble fortement soutenue par les États-Unis en raison de ses prises de position très atlantistes ? En fait, les relations entre le chancelier et sa ministre des Affaires étrangères sont plus que tendues si l’on en croit la presse allemande. A laisser faire, Scholz apparaît ainsi comme un faible. Cette semaine, tous deux sont à New York pour le débat général de l’ONU et l’on se demande qui des deux élaborent la politique étrangère et qui en est responsable ?
 
 

Et si l’on veut bien se rappeler qu’en 2021 Baerbock était pressentie pour succéder à Merkel, on prend conscience que l’Allemagne, mais aussi l’Europe, ont évité le pire. Dieu merci, Baerbock a cumulé plusieurs scandales, allant du C.V. trafiqué à des plagiats, ce qui a neutralisé sa candidature. Mais les « verts » allemands étaient indispensables à une coalition, et il a bien fallu trouver une place de choix à la leader des écologistes. Reste que la dernière sortie de Baerbock envers XI Jinping risque d’avoir de graves conséquences. Ce qui fait dire au politologue Ofitserov-Belsky que la ministre n’a jamais travaillé dans l’intérêt de l’Allemagne. Mais qu’a dit exactement Annalena Baerbock cette fois-ci ? Pourquoi ses paroles ne sont-elles pas de simples bêtises ? Et quelle sera la réaction de la Chine en fin de compte ? 

Un chien fou dans un jeu de quilles

Il y a quelques jours, Annalena Baerbock a encore insulté un autre pays. Cette fois, c’était la Chine. Dans une interview accordée aux médias américains, la chef de la diplomatie allemande a déclaré que Xi Jinping est un « dictateur » et que l’éventuelle victoire de Vladimir Poutine en Ukraine serait pour lui un « guide d’action ». En termes simples, il s’agit d’une incitation à débarquer des troupes à Taïwan. En réponse aux déclarations provocatrices du ministre allemand des Affaires étrangères, le ministère chinois des Affaires étrangères a répliqué : « Les déclarations de la partie allemande sont absolument absurdes ».

La prise de position de Baerbock est en effet courante chez certains diplomates, notamment japonais. Ils l’expriment lors de conversations privées avec des journalistes et des collègues. Cependant, ils essaient toujours de ne pas le faire publiquement, afin de ne pas offenser leurs influents partenaires chinois. Cependant, Baebock a franchi le pas.

Cette sortie pourrait alors être présentée comme une plaisanterie, pour en limiter les effets. Ainsi que le souligne à juste titre le Berliner Zeitung, la Constitution chinoise est effectivement une dictature, mais une dictature du peuple. Or, Baerbock ne s’est pas reprise ni même excusée. Elle considère que ce qu’elle a tout dit est vrai et qu’elle a agi intelligemment.

Et bien sûr, les actions de Baerbock sont perçues à juste titre comme de la stupidité. « Quiconque trouve l’esprit perdu du ministre allemand des Affaires étrangères Baerbock, doit le remettre d’urgence au propriétaire : son état empire chaque jour », s’est moquée Maria Zakharova, représentante du ministère russe des Affaires étrangères. Et il est vrai que du point de vue des intérêts allemands, les propos de Baerbock sont réellement stupides.

C’est néanmoins la position politique des « verts » que Baerbock représente

« C’est la position de son parti. Les Verts sont le plus idéologique des partis allemands modernes, dont les représentants sont les plus enclins aux déclarations et aux actions dures. Les deux autres partis de la coalition au pouvoir ne se seraient guère exprimés de la même manière », explique Vadim Trukhachev – professeur associé à l’Université d’État russe des sciences humaines -. Et le problème, c’est que les Verts ne protègent pas les intérêts de l’Allemagne.

« Il s’agit d’un phénomène courant chez les écologistes européens », explique Dmitry Ofitserov-Belsky – chercheur principal à l’IMEMO RAS. Il faut savoir que les partis écologistes ont été créés grâce à des subventions internationales (c’est-à-dire américaines), et les Américains ont expliqué aux élites européennes qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter de leur parrainage, puisque ces partis n’avaient pas beaucoup d’avenir. « Ils ont un agenda très étroit, une vision étroite des problèmes », mais ces partis, disent-ils, « peuvent absorber les gauchistes les plus radicaux qui ne deviendront pas communistes »

En réalité, la crainte du courant dominant européen a été si forte à l’égard des communistes qu’elle a conduit à promouvoir fortement les organisations environnementales et que des pans entiers de la communication politique leur ont été laissés, y compris dans le domaine économique.

Les gouvernements européens ne les ont pas discrédités dans les médias, et n’ont pas interféré avec leur processus de financement : au contraire, investir dans l’environnement est devenu à la mode ! « Ensuite, en Allemagne, ces partis se sont fortement lancés dans la vraie politique. Et maintenant il n’y a aucun moyen de chasser ces agents d’influence américains », note Dmitri Ofitserov-Belsky.

Baerbock est une écologiste classique, mais au service des États-Unis

« Annalena Baerbock n’a jamais travaillé dans l’intérêt de l’Allemagne. Elle est ministre des Affaires étrangères, mais travaille dans l’intérêt des États-Unis. Mme Berbock a effectué un voyage d’échange en Floride à l’âge de 15 ans, elle est depuis lors en constante admiration pour l’Amérique », explique Dmitri Ofitserov-Belsky.

En fait, la position de la ministre ne reflète pas simplement celle de Joseph Biden (qui a également parlé du « dictateur » Xi Jinping). Elle fait partie de la politique anti-européenne plus large des États-Unis. « La tâche des Américains est d’isoler les Européens de tout le monde, sauf d’eux-mêmes. Les priver d’indépendance. Désormais, les Allemands ne disposeront pas de Nord Stream, et à l’avenir, il n’y aura pas de 6G chinoise. Toute cette histoire ne concerne pas le téléchargement de films d’un gigaoctet en cinq secondes, mais l’Internet industriel. L’industrialisation 4.0, dans laquelle les Allemands allaient devenir leader en Europe et même devenir l’un des leaders mondiaux. Mais désormais, il n’y aura pas de numérisation, il n’y aura pas de gaz bon marché et, soit dit en passant, il n’y aura pas non plus d’énergie nucléaire : rien ne se passera. Il y aura une récession continue et une transformation en une colonie américaine arriérée », résume Dmitri Ofitserov-Belsky.

Non seulement les écologistes allemands travaillent à cette tâche, mais aussi les bureaucrates européens. La Commission européenne, dirigée par Ursula von der Leyen, tente notamment de provoquer une guerre commerciale sino-européenne. Et la question est de savoir comment la Chine va-t-elle réagir à cela ?

La Chine a la capacité de punir économiquement l’Allemagne

Bien sûr, Pékin a sévèrement critiqué Baerbock. « Les déclarations de la partie allemande sont absolument absurdes, elles nuisent gravement au prestige politique de la Chine, il s’agit d’une pure provocation politique », a déclaré la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning.

Selon Vadim Troukhachev, « La Chine peut réagir. Par exemple, aggraver les conditions de travail des entreprises allemandes sur leur territoire. Ou ralentir le chargement des marchandises vers l’Allemagne. Elle peut racheter aux Allemands les volumes de pétrole et de gaz qu’ils ont affrétés. Il va sans dire que de notre côté, nous devons travailler à affaiblir l’influence de l’Allemagne et de l’UE en Asie, en Afrique et en Amérique latine ».

Cependant, une sanction punitive bien plus grave a déjà été prise : les Chinois (comme la Russie) ont tout simplement cessé de percevoir l’Europe en tant qu’élément clef de la politique mondiale. « Les Chinois avaient de nombreux projets pour l’Europe. Mais le COVID, le conflit en Ukraine et la récession européenne réduisent pour la Chine le potentiel que représente l’Europe en général et de l’Allemagne en particulier. Oui, les intérêts demeurent, mais il est désormais difficile de parler de projets à grande échelle et de grande envergure », souligne Dmitri Ofitserov-Belsky. 

L’UE a-t-elle encore une chance d’améliorer son image ?

Il existe encore des forces en Europe intéressées par une coopération avec la RPC. « L’Europe est hétérogène, il y a une lutte interne entre différents partis paneuropéens, entre différents pays. Mais contrairement à la Russie, où les différends à l’égard de l’Europe sont minimes, en Chine ils sont plus importants », explique Vadim Trukhachev.

Il semblerait que ces forces voulant une coopération avec la Chine existent également en Allemagne. Par conséquent, l’on peut supposer que les électeurs de ce pays n’apprécieront probablement pas les conséquences de la déclaration de Baerbock envers la Chine.

Cependant, les sondages d’opinion montrent que ce n’est pas aussi évident. En effet, aujourd’hui encore, si les scores des deux partis de la coalition (SPD et démocrates libres) sont en baisse, ceux des Verts augmentent ! Ce n’est probablement pas parce que les Allemands sont enclins au suicide. La raison en est que, face à des politiciens allemands effacés et brouillons, Baerbock s’agite de façon agressive et, en fait, suscite de la sympathie. Ainsi, une fraction des électeurs allemands apprécie son style de comportement, quelles qu’en soient les conséquences.
 
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/09/22/comment-les-chinois-vont-punir-lallemagne-pour-avoir-insulte-xi-jinping-par-gevorg-mirzayan/

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