Les allégations du lanceur d’alerte David Grusch sont-elles une PSYOP (Opération psychologique) ?
« Je pense que les critiques ne tiennent pas compte de l’essentiel. L’essentiel, c’est le degré d’attention que le gouvernement a accordé à cette affaire, ce qui en dit plus long que toute autre chose sur la valeur des propos de Grusch ».
Dr. Garry Nolan.
Les extraordinaires allégations de David Charles Grusch sur des programmes de rétro-ingénierie profondément secrets, en possession d’engins d’origine non humaine intacts ou partiellement intacts et d’entités biologiques exotiques, ont suscité un retentissement mondial et ont activement interrogé le public et les spécialistes de la question.
Elles ne sont pourtant que le dernier avatar d’une longue suite de rumeurs et de témoignages à ce propos, dont l’une des plus substantielles est l’affaire du mémo Smith et du courrier de Robert Sarbacher le confirmant, sur lequel nous proposerons un développement particulier.
L’objet du présent article n’est pas de discuter du niveau de crédibilité des informations dont Grusch est autorisé à discuter ou de son parcours professionnel, mais plutôt de débattre de la vraisemblance de l’hypothèse, souvent évoquée dans le débat public qui a suivi ses révélations, d’une opération de désinformation ou « PSYOP » (Opérations psychologiques, « Psychological operations »).
Notons toutefois en introduction que David Charles Grusch, 36 ans, ancien officier de combat décoré en Afghanistan, est un vétéran de la National Geospatial-Intelligence Agency (NGA) et du National Reconnaissance Office (NRO), a été le représentant du bureau de reconnaissance au sein du groupe de travail sur les phénomènes aériens non identifiés de 2019 à 2021 puis, de fin 2021 à juillet 2022, le co-responsable de la NGA pour l’analyse des UAP (Unidentified Anomalous/Aerial Phenomena) et son représentant au sein du groupe de travail du Pentagone sur les OVNI. De nombreuses sources crédibles attestent non seulement de son niveau d’accréditation sur ce sujet au sein du Département de la Défense (DoD) mais aussi de la réalité de ses allégations.
Son témoignage sous serment, -d’abord jugé crédible et sérieux par l’Inspecteur Général de la Communauté du renseignement puis transmis au Congrès devant lequel il livra ses informations durant 11 heures d’audition- semble avoir été suffisamment éloquent pour que le Congrès introduise un nouveau dispositif législatif, après la loi sur les lanceurs d’alerte UAP.
Un récent projet de loi prévoit en effet que « toute personne actuellement ou anciennement sous contrat avec le gouvernement fédéral qui a en sa possession du matériel ou des informations du gouvernement fédéral concernant des phénomènes anormaux non identifiés qui étaient ou sont actuellement protégés par toute forme d’accès spécial ou restreint » notifie dans les 60 jours suivant la promulgation de la loi et fournisse dans un délai de 180 jours au directeur du All-domain Anomaly Resolution Office (AARO) « une liste complète de tous les matériels d’origine non terrestre ou exotique relatifs à des phénomènes anormaux non identifiés » qu’il possède et les mette à la disposition du directeur de l’AARO à des fins « d’évaluation, d’analyse et d’inspection »[1].
Ce constat posé du crédit global accordé au protagoniste principal de cette affaire, il convient désormais de définir ce que pourrait être une opération de désinformation ou « PSYOP » appliquée aux OVNI.
Les PSYOP sont des opérations visant à transmettre des informations à certains publics afin d’influencer leurs motivations et leur raisonnements objectifs et in fine, d’induire une modification du comportement de gouvernements, d’organisations, de groupes et de grandes puissances étrangères, dans un sens favorable aux intérêts de l’organisation ou de l’Etat qui en est l’émetteur. En 1997, dans sa « Petite histoire de la désinformation » (Editions du Rocher — 1999), Volkoff donne de la désinformation la définition suivante : « La désinformation est une manipulation de l’opinion publique, à des fins politiques, avec une information traitée par des moyens détournés ». Le DoD, dispose de différentes unités dédiées aux PSYOP mais d’autres institutions fédérales américaines comme le Département d’Etat sont habilitées à conduire ce type d’opérations avec une limite théorique, l’interdiction posée aux forces américaines PSYOP de tenter de changer les opinions de « personnes américaines » (citoyens, résidents ou personnes morales), où que ce soit dans le monde[2].
Notons d’ores et déjà que cette dernière disposition rendrait ainsi illégale une opération de type PSYOP sur les OVNI, celle-ci étant évidemment de nature à modifier les opinions et perceptions des citoyens américains. Mais admettons que le Pentagone ne s’embarrasse pas de légalité, et il y a de bonnes raisons de le penser si l’on en croit un article du magazine Rolling Stone en date du 23 février 2011, qui rapportait que le lieutenant-général William Caldwell, un général trois étoiles chargé de la formation des troupes afghanes, avait commandé des opérations d’information (IO) pour cibler les délégations du Congrès visitant sa base dans le cadre d’une campagne visant à manipuler les perceptions et opinions des sénateurs et représentants américains par le biais d’opérations psychologiques (PSYOP). Ces révélations faisaient dire au journaliste Robyn Greene le 2 mars 2011 : « Le Congrès doit réaffirmer son indépendance et rassurer le public américain sur le fait que les élus civils conservent le contrôle de toutes les activités militaires et de renseignement. Il est essentiel que le Congrès remplisse ses fonctions de surveillance et mène une enquête publique indépendante concernant toute activité potentiellement illégale dans laquelle la cellule des OI du lieutenant-général Caldwell pourrait s’être engagée ».
Selon Betsy Woodruff Swan and Lara Seligman de Politico, l’US Army conduit des PSYOP au moins depuis la Première Guerre mondiale, lorsqu’elle a créé une unité chargée d’élaborer et de diffuser de la propagande par tracts à l’attention de la population étrangère. L’Armée et la CIA ont déployé des opérations psychologiques de plus grande ampleur lors de conflits récents, par exemple en utilisant des émissions de radio pour lutter contre le communisme durant la guerre froide, ainsi que des tracts et des émissions par haut-parleur pour inciter les troupes irakiennes à se rendre au cours de la guerre du Golfe en 1991. En 2010, à l’initiative du Secrétaire d’Etat à la Défense, la terminologie “opérations militaires de soutien à l’information” a été préférée à celle de PSYOP, connotée péjorativement, comme le note The Atlantic.
Dans un article pour The Collector, Owen Rust établit que la guerre psychologique est aujourd’hui un outil courant de la planification militaire moderne, mais il démontre que les opérations effectuées se situent dans des contextes de conflit militaire, toujours sur des terrains étrangers, l’usage des PSYOP sur le sol américain et à destination du public américain demeurant illégal, rappelons-le.
Toutefois, les rumeurs associées à des PSYOP manipulant l’opinion à partir de la croyance aux OVNI sont anciennes, pour ne pas dire qu’elles sont un argument sceptique imparable, une PSYOP étant par définition une opération à la fois vraisemblable et qui, relevant des services secrets, ne peut donc quasiment jamais être définitivement établie.
Pour Andrew Follett de la National Review, il s’agit de ne pas être dupes : « il s’agit probablement d’une autre opération psychologique du gouvernement. Nous l’avons déjà vu. Depuis plus d’une semaine, de nombreuses personnes, y compris des personnalités de la droite politique, ont monté en épingle la prétendue révélation par un initié de la communauté du renseignement d’un programme gouvernemental secret visant à récupérer des vaisseaux spatiaux extraterrestres écrasés — une affirmation qui présente une similitude inquiétante avec de précédentes campagnes de désinformation bien documentées menées par le gouvernement pour discréditer des personnes “problématiques” ».
Dans une tribune sur LinkedIn, Charles Minskoff s’interroge : « Les services de renseignement sont-ils à l’origine d’une vaste campagne de désinformation visant à dissimuler la vérité sur les PAN et à garder le contrôle de ce phénomène énigmatique ? ».
L’auteur poursuit :
« Les empreintes digitales des agences de renseignement sont présentes sur certaines des rencontres les plus célèbres avec des UAP, comme l’incident de Roswell et l’affaire de la forêt de Rendlesham. On peut donc soupçonner ces agences de diffuser délibérément de fausses informations afin de créer la confusion et de contrôler le récit autour des UAP, tout en étudiant activement le phénomène UAP et en gardant le public dans l’ignorance. (…)
Une théorie convaincante de cette croisade de désinformation est que les agences de renseignement protègent les technologies militaires avancées de l’attention du public et des adversaires potentiels. L’élaboration d’un écran de fumée sur les observations et les rencontres d’UAP permet de camoufler efficacement leurs projets de pointe.
D’autres pensent que les UAP sont utilisés dans le cadre d’opérations psychologiques visant à susciter la peur et l’incertitude, afin de rendre le public plus vulnérable à la manipulation. En perpétuant l’énigme des UAP, les services de renseignement peuvent entretenir un climat d’anxiété et d’intrigue.
(…)
Alors que l’existence des UAP devient de plus en plus indéniable, restons vigilants et sceptiques quant aux informations que nous recevons. Les services de renseignement ont tout intérêt à contrôler le récit, et il est essentiel d’envisager la possibilité qu’une campagne de désinformation méticuleusement orchestrée façonne en grande partie notre connaissance des UAP. C’est en faisant preuve d’esprit critique et en examinant avec diligence toutes les preuves disponibles que nous pourrons découvrir la vérité sur ces mystérieux phénomènes aériens ».
Pour Lucas Leiroz, chercheur en sciences sociales à l’Université fédérale rurale de Rio de Janeiro, les OVNI sont utilisés par le pouvoir américain pour « empêcher les médias de prêter attention aux récentes catastrophes chimiques dans le pays et en même temps susciter l’inquiétude des citoyens face à de prétendues “menaces inconnues”, qui pourraient permettre l’avancement des agendas militaires ».
Citant les arguments des sceptiques dans « Dazed », Thom Waite évoque le fait que « D’une part, les antécédents de Grusch — au sein de la NRO, de la NGA et de l’armée américaine, qui l’a vu servir en Afghanistan — ne contribueront pas beaucoup à étouffer les théories selon lesquelles les OVNI sont une opération psychologique du gouvernement visant à distraire les citoyens ou à obtenir un soutien pour les programmes militaires. En outre, la dissimulation de l’existence des OVNI aurait nécessité une coordination internationale massive sur plusieurs décennies (alors que les dirigeants du monde n’arrivent même pas à se réunir pour résoudre les problèmes qui se posent à nous). Malheureusement, Grusch ne dispose pas non plus de preuves matérielles ».
Il existe néanmoins de vrais arguments qui invalident l’hypothèse PSYOP....
Lire la suite... https://medium.com/@thibaut.canuti/les-all%C3%A9gations-du-lanceur-dalerte-david-grusch-sont-elles-une-psyop-op%C3%A9ration-psychologique-2c099d9f661
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