lundi 27 mai 2024

EFFONDREMENT

L’Occident joue les Karens du droit international (Karen étant le nom commun aux USA utiliser pour désigner une personne hystérique)



Alors que les opérations menées par Israël à Gaza semblent augmenter d’intensité, la Cour Internationale de Justice (CIJ) vient de demander à l’état hébreu d’« arrêter immédiatement son offensive militaire ».

Ces jugements de la Cour Internationale de Justice, organe des Nations Unies créé en 1946, semble ainsi s’ajouter aux demandes de Karim Khan, le premier procureur de la Cour Pénale Internationale (CPI), un organe indépendant créé suite au Statut de Rome en 1998, qui souhaite que soit lancé des mandats d’arrêt internationaux contre les dirigeants du Hamas et ceux d’Israël, estimant qu’ils se sont rendus coupables de crimes de guerre et contre l’Humanité.



Cet empilement de décisions judiciaires pousse à noter la croissance presque difficile à suivre de ces affaires et de la multiplication de l’utilisation de différents cadres nationaux et internationaux pour poursuivre des individus ou des pays en fonction des humeurs du moment.

Ainsi, le cas d’Israël n’est pas isolé, loin s’en faut et il n’y a guère besoin de remonter loin dans le temps pour voir une nouvelle bordée d’agitations judiciaires internationales, cette fois-ci à l’encontre de la Russie : d’abord en 2014 (suite à l’invasion russe de la Crimée) puis en 2022 (suite au conflit ukrainien), la “communauté internationale” – i.e. un sous-ensemble correspondant aux pays occidentaux, en gros – avait décidé d’empiler des sanctions contre la Russie de Vladimir Poutine. De même, la Hongrie de Orban fait aussi les frais au sein de l’Union européenne de ses prises de positions favorables aux Russes.



Ces sanctions n’ayant eu pour la Russie qu’un effet modeste voire carrément contre-productif, il a été décidé de disposer des avoirs russes gelés depuis le début du conflit en Ukraine afin d’armer Kiev.

Souplesse du droit international qui permet donc à certains pays de piocher dans les avoirs d’un autre ; s’il n’y avait pas eu quelque vote auparavant, cela pourrait s’apparenter à un vol. Que c’en soit ou non, une telle décision sera lourde de conséquences : les pays qui investissent en Europe recalculeront leur risque à l’aune de cette décision et choisiront probablement d’abandonner ces pays à leur sort, voire en profiteront pour vendre ces bons avant que leur valeur rejoigne la fiabilité contractuelle de ces pays.

Au final et quand bien même la décision fut prise puis votée dans un cadre tout ce qu’il y a de légal, on peut se demander si ce vernis de justice n’aura pas servi qu’à aveugler les dirigeants qui ont pris là une funeste décision.

En pratique, on voit surtout se multiplier les occurrences d’une “justice occidentale”, à laquelle les uns et les autres font appel de façon sélective, en croyant résoudre les problèmes du monde alors qu’elle apparaît de plus en plus percluse de contradictions et de doubles standards embarrassants que seules les dirigeants font mine de ne pas voir.

On avait déjà noté la façon très particulière des États-Unis de lire et appliquer le droit international, leur seconde incursion en Irak offrant une magnifique démonstration de leur audace juridique (et, du reste, les cas d’interprétation hardie de ce droit se sont multipliés depuis les années 90).

Depuis, les dirigeants occidentaux multiplient les institutions et les organes concrétisant une sorte de droit international, multiplient les références à ce dernier dans la marche du monde, mais multiplient aussi les applications ambigües voire les violations à ce même droit. L’exemple de Julian Assange, actuellement détenu en prison sans le moindre procès pour avoir mis à jour des éléments qui se sont tous révélés exacts, laisse ainsi songeur et la discrétion des organes internationaux (CPI, CEJ, CIJ et d’autres, pourtant dédiés à lutter contre les injustices mondiales) devant ce cas ne semble guère froisser les médias. La mollesse de ces mêmes institutions dans le cas des Ouighours, des Tibétains, des Yéménites, des Arméniens et de tant d’autres laisse aussi perplexe.

Ces différents exemples amènent à constater que l’Occident n’arrête pas de brandir le levier judiciaire pour faire mine de régler certains de ses différents problèmes comme une sorte de Karen surexcitée qui en appelle de façon sélective aux plus hautes autorités afin de faire avancer son agenda, en accompagnant sa distribution incessante de moraline d’une volonté farouche de coller des normes, des règles et du juridique absolument partout ce qui lui permettra au passage de punir tout impétrant qui oserait s’ériger contre elle.



Cela ne vient pas de nulle part.

Les élites occidentales développent – surtout actuellement – un véritable culte à la norme : tout doit être réglé par celle-ci. Les échanges et arrangements économiques, sociologiques et géopolitiques naturels, humains, sont devenus secondaires, contingents de ce droit à géométrie variable. Il faut de la norme, de la règle, de la loi, avec un côté systématique qui ne peut pourtant même pas se parer d’un côté logique puisqu’il verse régulièrement dans l’arbitraire (ce qui rend l’ensemble de l’édifice ridicule aux yeux de ceux qui n’y souscrivent tout simplement pas). À ceci s’ajoute que ces institutions du droit international ne sont pas toutes ratifiées de la même façon (les États-Unis et Israël n’ont pas ratifié la CPI par exemple) ce qui en rend leurs admonestations d’autant plus inaptes.

Eh oui, le droit n’est, en lui-même, qu’une convention qui n’a aucune valeur lorsqu’elle est détachée des contingences du réel : les sanctions contre la Russie, gesticulations de papier sans lien avec la réalité de terrain et la géopolitique factuelle, ont été un magnifique exemple de cette virtualité du “droit international”, qui contraint effectivement les Européens mais pas les États-Unis (qui détestent les engagements internationaux contraignants au point de s’en protéger dans leur propre loi), ni les Russes, ni les Chinois ni les Indiens…

Or, actuellement, il y a en politique une confrontation majeure entre la pensée institutionnelle qui voit le monde à travers des institutions et du droit – qui est souvent du droit positif (par opposition au droit naturel) et donc politique – et le réalisme politique, la diplomatie et la stratégie géopolitique qui cherchent à appréhender le monde tel qu’il est.

Manifestement, les élites occidentales s’enferrent chaque jour un peu plus dans la première vision, pendant qu’une part croissante des dirigeants non occidentaux s’attachent à la seconde vision, plus réaliste. Et s’il est évident qu’il y a aussi des réalistes en Occident – certains d’entre eux doivent même utiliser l’idéalisme et l’idéologisme exacerbé des autres pour avancer leurs propres objectifs pragmatiques – ce ne sont pas eux qui prennent les décisions.

Petit-à-petit, cela se traduit par une perte totale de crédibilité du droit international, et la responsabilité en incombe lourdement à l’Occident.


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