Malgré le rejet de sa loi immigration, Macron vise une adoption d’ici à la semaine prochaine sans 49.3
Au lendemain du vote de la motion de rejet à l’Assemblée nationale, le président de la République a écarté l’hypothèse d’une dissolution ou d’un 49.3 sur ce texte, lors d'un dîner à l'Élysée avec les responsables de sa majorité.
Un dîner au goût de réunion de crise politique. Au lendemain du rejet du projet de loi immigration avant même le début des débats, Emmanuel Macron a organisé mardi soir un dîner à l’Élysée, trois heures durant. Autour de la table, étaient présents la chef du gouvernement Élisabeth Borne, les ministres concernés dont Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, les responsables de sa majorité parlementaire, ainsi que les chefs de Renaissance et du MoDem - Stéphane Séjourné et François Bayrou. En déplacement dans les Bouches-du-Rhône, Édouard Philippe a été remplacé par le ministre (Horizons) de la Transition écologique, Christophe Béchu.
«Déterminé», selon l’un de ses soutiens présents, le président de la République a demandé à ses troupes de trouver un chemin pour avancer «vite». Il souhaite qu’un compromis soit trouvé «dans les meilleurs délais» entre les sept députés et les sept sénateurs de commission mixte paritaire (CMP), convoquée lundi à l’Assemblée nationale.
Le locataire de l’Élysée espère voir le texte définitivement adopté «la semaine prochaine», à l’issue d’un accord puis d’un ultime vote à l’Assemblée et au Sénat qui pourrait intervenir dès mardi ou mercredi. Pour y parvenir, «chacun devra prendre sa part, majorité comme opposition», a-t-il déclaré quelques heures plus tôt en conseil des ministres. Une manière de préparer les esprits à d’indispensables concessions, du fait de la composition de la commission mixte paritaire - sur ses 14 membres, cinq sont issus de la droite et autant du camp présidentiel.
Au fond, personne ne souhaite que cette situation de flottement politique s'éternise. Alors que la droite et le Rassemblement national (RN) font des régularisations de travailleurs sans-papiers une ligne rouge, «le président souhaite un dialogue constructif mais sincère pour bâtir un compromis si possible», dit un convive. Le même indique qu’«il a demandé aux parlementaires de faire leur travail, sans donner aucune consigne sur les négociations». «Il n'y a pas de réussite individuelle. Il n'y a que des échecs collectifs», s'est en outre laissé philosopher Emmanuel Macron. Une façon d'inviter des Républicains obstinés à prendre leur part de responsabilité.
Abandon du texte en cas de désaccord
Face aux secousses, le président de la République a une nouvelle fois écarté l'hypothèse d'une dissolution ou d'une adoption sans vote du texte, via un recours au 49.3. Il a été décidé que seul un désaccord entre les députés et les sénateurs, en commission mixte paritaire, conduirait à son abandon. Et à la fin d'un parcours législatif accidenté, après dix-huit mois de pourparlers en coulisses et au Parlement.
Afin de «sécuriser» un accord puis l'adoption du projet de loi, les députés de la majorité ont prévu de se concerter, à commencer par ceux de Renaissance dès mercredi, avant une réunion commune avec le Mouvement démocrate (MoDem) et Horizons jeudi matin. Une préparation exceptionnelle tant le sujet est explosif. «Il faudra qu'on accepte un texte de compromis», a prévenu le chef du groupe majoritaire, Sylvain Maillard. Tout en présentant ses revendications : accroche législative sur les régularisations de travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension, interdiction du placement des mineurs en centre de rétention administrative et maintien de l'aide médicale d'État (AME).
Soucieux de ne pas apparaître entravé, Emmanuel Macron a appelé ses troupes à agir «avec férocité». Et a dramatisé l'enjeu en parlant d'un «moment solennel pour la majorité sur notre capacité à faire avancer des textes au service de l'intérêt général». Tenants d'une ligne minoritaire, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, le chef des députés MoDem, Jean-Paul Mattei, et le sénateur (Horizons) Claude Malhuret ont, eux, plaidé pour un calendrier plus souple, afin de laisser plus de temps aux débats, y compris en janvier si nécessaire.
Un scénario auquel a rapidement coupé court le chef de l'État, désireux d'en finir avec ce texte pour enfin se tourner vers la suite. Tout comme les membres de la réunion, qui se sont entendus sur la nécessité de se projeter en janvier vers les réformes économiques, les textes sur le logement et la fin de vie. Et surtout vers le prochain scrutin : les élections européennes du 9 juin 2024.
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