dimanche 1 septembre 2024

EVIDENCES

 L'Europe n'est plus équipée industriellement pour faire de l'économie de temps de guerre.

L’entreprise allemande Rheinmetall laisse tomber la Pologne contre l’Ukraine.

Par Pierre Duval pour Observateur-Continental

La Pologne n’a pas la capacité d’avoir des munitions d’artillerie car aucune entreprise polonaise n’a aujourd’hui la capacité de produire des munitions d’artillerie de 155 mm alors que Varsovie doit remplir les entrepôts d’un million d’obus et doit faire face à l’échec du contrat avec l’entreprise allemande Rheinmetall. 

La société polonaise vient d’apprendre par le truchement de ses médias que l’entreprise allemande produit ses obus sur le territoire d’un pays allié à la Russie, ce qui explique le non-respect du contrat envers la Pologne. Dans cette affaire, l’alliance entre les membres de l’OTAN s’avère être très fragile. La réalité des moyens militaires vient détruire la communication des responsables politiques polonais, mais, également européens.  

«L’armée polonaise a besoin d’au moins un million de munitions d’artillerie de 155 mm», rapporte le média polonais Rzeczpospolita, signalant: «Aucune entreprise polonaise n’a aujourd’hui la capacité de produire des munitions d’artillerie de 155 mm». Le média polonais rajoute: «En 2022, il n’y avait presque pas de munitions de ce type dans l’armée polonaise, nous n’avions qu’une douzaine de milliers d’obus. C’est pourquoi le ministère de la Défense de l’époque a commencé à rechercher des fournisseurs dans le monde entier. Les munitions ont été achetées en Corée du Sud dans le cadre du contrat relatif aux obusiers K9. Les livraisons se poursuivent. 

Le sous-traitant de Rheinmetall pose des problèmes. Quelques mois après le début du conflit en Ukraine, la Pologne a acheté des munitions auprès de la société d’armement allemande Rheinmetall: 50.000 obus. Rzeczpospolita a réalisé un entretien avec un responsable de l’agence de l’armement, une unité du ministère polonais de la Défense, qui stipule: «Nous sommes en août 2024 et nous n’en avons pas reçu un seul obus». Selon le média polonais, «le contrat de Rheinmetall a été retiré le 20 juillet 2023 en raison de problèmes liés à l’exécution du contrat par le sous-traitant». Les munitions destinées à la Pologne devaient être produites par la société sud-africaine Rheinmetall Denel Munition, une filiale du géant allemand, dont elle détient 51% d’actions.    

L’Afrique du Sud bloque la livraison. Les livraisons de munitions à la Pologne ont été bloquées – plus ou moins directement – par le gouvernement de la République d’Afrique du Sud, craignant qu’elles ne soient acheminées vers l’Ukraine. L’Afrique du Sud est plus proche de la Russie car elle partage des accords dans l’alliance des BRICS, plutôt qu’avec l’Ukraine. 

La Pologne est sous le choc. Les relations, dans le passé, n’ont jamais été bonnes entre Varsovie et Berlin. Le traitement du géant allemand Rheinmetall est devenu une affaire sérieuse dans le pays de Chopin et cela est considéré comme une trahison. Les responsables politiques polonais, qui se sont engagés auprès de l’Ukraine et qui annoncent des autorisations à Kiev pour bombarder la Russie, réalisent subitement qu’en cas de guerre avec la Russie, les approvisionnements en provenance de l’étranger pourraient tout simplement ne pas arriver, pour des raisons à la fois logistiques et politiques. Le Groupe d’armement polonais, Polska Grupa Zbrojeniowa (PGZ), est, d’après le quotidien polonais, «en mesure de produire environ 30.000 obus de 155 mm par an». Comble de la catastrophe, c’est «le potentiel maximum de PGZ, à condition que les sous-traitants, principalement slovaques, remplissent leurs contrats». 

«En clair, la Pologne n’est pas aujourd’hui en mesure de produire seule des munitions de 155 mm», conclut Rzeczpospolita. Il y a un autre point qui touche en plein cœur la stratégie de la défense polonaise. Il s’agit des drones Orlik qui n’ont jamais été livrés alors que les contribuables ont dépensé des centaines de millions d’euros. 

Le média polonais, Fronstory, a rapporté en juillet dernier: «La Commission européenne assure que les entreprises européennes seront en mesure de produire entre 1,4 et 1,7 million de munitions d’artillerie de 155 mm par an d’ici la fin de l’année»; «Mais, la capacité de production européenne pourrait être presque trois fois inférieure». «Officiellement, Polska Grupa Zbrojeniowa n’est capable de produire que 30 à 40.000 obus de calibre 155 mm par an. Selon les experts du secteur, le rythme réel pourrait être encore plus lent. L’industrie de l’armement attend depuis plus d’un an l’argent du gouvernement pour investir». «Actuellement, l’Ukraine et toute l’Europe sont confrontées à une pénurie de munitions essentielles de 155 mm», stipule, encore, les journalistes polonais. Depuis 2022, Rheinmetall n’a pas honoré commande polonaise d’obus de 155 mm.  

En juin dernier, Forsal rapportait que «la Bundeswehr a commandé des munitions (la fourniture de munitions de 155 millimètres d’une portée de 40 kilomètres) pour une valeur de 8,5 milliards d’euros». Le média polonais soulignait que «les munitions commandées visent à reconstituer les stocks des forces armées allemandes et des pays alliés et qu’elles serviront également à «soutenir l’Ukraine dans sa lutte défensive» contre la Russie. La Pologne et ses alliés se réjouissaient de la livraison de plusieurs millions d’obus de 155 mm. Pour le PDG de Rheinmetall, Armin Papperger, il s’agissait de «la plus grosse commande de l’histoire récente de l’entreprise». 

En effet, comme indiqué par le gouvernement allemand le 19 août dernier, depuis 2022, l’Allemagne a livré à l’Ukraine 180.000 obus de 155 mm alors que Berlin aurait dû honorer la commande polonaise. Ainsi, les responsables politiques de Berlin et l’entreprise allemande Rheinmetall laissent tomber la Pologne au profit de l’Ukraine. 

Les conséquences percutent la stratégie militaire de la Pologne mais aussi l’économie de l’industrie de guerre de l’Allemagne. «Rheinmetall accuse avec une petite perte: la Pologne annule la commande de munitions de Rheinmetall», annonce le média Finanzen.  

Pierre Duval

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