La lutte contre le sentiment d’insécurité bat son plein.
Par H16
On y est, pas de doute : avec le nouveau gouvernement Barnier “état neuf peu serviable”, les priorités ont été clairement définies et, parmi elles, l’insécurité est devenu un sujet qui a immédiatement été pris à bras le corps par nos nouveaux ministres. Avec Retaillaud d’un côté et Migaud de l’autre, le succès des prochaines politiques en la matière est garanti.
D’ailleurs, c’est une tendance maintenant générale dans le pays. En effet, s’il y a encore une paire d’années, le discours officiel était que l’insécurité n’était qu’une impression, un sentiment et que la France ne pouvait pas, ne devait pas être vue comme un coupe-gorge (merci à Eric Dupond-Moretti de nous l’avoir gentiment rappelé), à présent l’opinion publique des politiciens est en train de changer : petit-à-petit, l’insécurité n’est plus un fantasme d’extrême-droite, mais une réalité un peu gênante…
…Avec laquelle il va falloir apprendre à vivre, manifestement.
Car oui, vous l’avez bien compris : il ne s’agit surtout pas de combattre l’insécurité – ce qui serait une politique d’extrême-droite, et le fascisme ne passera pas par nous, enfin voyons – mais plutôt d’adapter nos modes de vies et nos habitudes à cette nouvelle réalité, tout en revoyant à la baisse nos attentes en matière de vivre-ensemble, histoire de faire correspondre des buts modestes à des situations changeantes. Évidemment, l’étape suivante consistera à constater que, certes, l’insécurité explose, mais que c’est une très bonne chose et charge aux politiciens et aux médias de trouver ensuite pourquoi. Gageons qu’ils pondront une délicieuse explication.
Dès lors, outillés de ce déni de réalité cette méthodologie simple, il devient beaucoup plus aisé de comprendre les mesures prises par les autorités pour gérer les petits soucis de sécurité du quotidien.
Prenez un fait divers consternant comme, par exemple, l’agression en août dernier par un clandestin nigérian d’une trentenaire qui avait été victime d’un viol alors qu’elle se trouvait dans un parking de la ville de Metz : dans un pays où l’insécurité serait un vrai problème et pas seulement un sentiment d’extrême-droite, les autorités auraient cherché à accroître la surveillance de ce genre de lieux (par exemple avec un gardiennage, une présence policière accrue), à y réduire les sources potentielles de criminalité (depuis les points de deal de drogue en passant par un suivi des OQTF, au hasard).
Rassurez-vous, il n’est pas question de ceci en France et nous échapperons donc à toute droitisation de l’action de l’État : le maire de Metz a donc courageusement choisi de peindre des places de parking en jaune, signifiant ainsi qu’elles sont réservées aux femmes, cette couleur devant probablement faire fuir les violeurs ou quelque chose comme ça.
Et voilà, problème résolu puisque les autorités se sont occupées de l’insécurité et ont même posé quelques actes précis.
Ce qui s’est passé à Metz n’est pas un cas isolé : partout, la République prend conscience qu’il faut agir et la voilà donc qui agit fermement.
Et donc dans la même veine, on retrouve la récente décision de coller une amende de cinquième catégorie (à 500 euros) pour toute détention d’un couteau : les autorités ont effectivement noté que les agressions au couteau se multipliaient, depuis les feuilles de boucher jusqu’aux machettes en passant par les couteaux de chasse ou de survie, il était donc temps qu’enfin soient sanctionnés… les porteurs de Laguiole ou d’Opinel.
Certes, en pratique et de façon discrète, il s’agit en réalité pour les autorités de modifier le traitement général de ce port d’arme : jusqu’à présent, se faire attraper avec un couteau sans motif légitime revenait à devoir potentiellement passer au tribunal. Outre la paperasserie évidente que ceci engendre pour une police qui nage déjà dedans, le moindre zèle à ce sujet pouvait entraîner un fort encombrement des tribunaux ; malin, le législateur a jugé plus efficace – et, ô divine surprise – plus rentable de remplacer la procédure par une jolie amende.
Bien évidemment, il est fort commode de taper ainsi sur des personnes solvables qui auront le malheur d’avoir un couteau sur elles. Les autres, les racailles à lame et autres OQTF déséquilibrés ne sont qu’assez rarement fouillées a priori, et lorsqu’une telle fouille révèle un port d’arme illégal, l’amende n’est pas émise devant l’insolvabilité (officielle) de ces individus.
Autrement dit, l’efficacité de la mesure est tout à fait comparable avec les parkings repeints en jaune de Metz : grâce à l’action déterminante de nos politiciens et de nos administrations, des choses ont été faites en rapport vague avec l’insécurité et pouf, immédiatement, le sentiment de cette dernière diminue. Ou quelque chose comme ça.
Vous l’avez compris : concrètement, lorsqu’il s’agit de lutter contre l’insécurité, les citoyens et les forces de l’ordre, tous confrontés à la réalité de terrain, ont des idées assez précises et efficaces sur ce qu’il conviendrait de faire.
Depuis l’application réelle de peines d’incarcération avec enfermement effectif – ne vous faites pas avoir par les statistiques bidons qui mélangent mises sous écrous et port de bracelets ou autres aménagements – jusqu’à la construction de nouvelles prisons en passant par une reprise en main de la Justice dont les clefs ont été laissées aux syndicats marxistes, il y a fort à faire mais rien d’insurmontable pour qui voudrait vraiment.
Et bien évidemment, rien de tout cela ne sera envisagé.
Retaillaud, nouveau ministre en charge de l’Intérieur, et Migaud, en charge de la Justice, n’ont ni l’étoffe ni la volonté de seulement envisager ces solutions ; seconds ou troisièmes couteaux sans panache choisis faute de mieux, ils vont servir de bouche-trou en attendant l’une ou l’autre dissolution ou motion de censure. Il n’y aura pas plus de nouvelles prisons qu’il n’y aura de volonté d’appliquer effectivement les peines jugées. La sécurité fera un excellent mot-clé dans les discours, et ce sera tout.
Pendant ce temps, les homicides en France continuent de grimper dangereusement comme le montrent les statistiques lorsqu’elles sont correctement épluchées : même en tenant compte de certaines minorations justifiables et justifiées dans le texte, on passe de 2139 homicides en 2010 à 4491 en 2020, soit plus du double.
Quant à la violence en général, les statistiques ne laissent pas non plus à de simples “sentiments” ou “impressions” : la France devient un pays dangereux. Pas de quoi s’inquiéter cependant : en interdisant les Opinels et en repeignant certaines places de parking en jaune, la situation devrait s’améliorer prochainement.
H16
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